vendredi 6 septembre 2019

Digression (19)

 
Blason de Zástava (Slovaquie)


J’aime la voix paradoxale, puisqu’il s’y résorbe tous les bruits et les mensonges de tous les miroirs concaves, convexes et même ceux qui défigurent l’être singulièrement. Par elle, je t’entends et je sonde le village. J’allume chaque soir un flambeau, parce que la courcelle voit le petit oiseau roi. J’aime que dans le vent s’élance les délicats boutons de rose, hébétée par le goût de la vie abondante. La vérité est un éclat de roche, pure, sans concession, comme une longue plainte, et surtout comme le jaillissement. J’ai découvert dans le morceau de roche de quoi boire pour l’éternité. C’est une amie sauvage qui écoute longtemps et qui scrute chaque détail. Tu dis que la vérité est crue et désamorce tous les pièges au sillon des images entêtantes. Je le sais. Mais ce n’est pas elle qui me fait peur. La joie de te retrouver, la joie de n’avoir jamais rien perdu, la joie béate. Réverbération en source une, sur l’éclat des miroitements du cœur, épousé de ta splendeur, lors que des virgules articulées sur l’écume de l’océan, voient le balancier de l’horloge devenir la respiration de ma douceur. Tu ne m’as jamais quittée, tu ne m’as jamais perdue, et tu n’as jamais changé. Debout, tu attends. Assis, tu attends. Allongé, tu attends. Je n’ai pas rêvé, puisque je m’éveille de la mort et je m’exclame : tu es vivant ! Chaque bête, même la plus infime me secoue de ma torpeur, et si j’ai marché violemment dans la brume du dimanche, ce jour clame enfin que je n’ai pas goûté l’amertume et tu me disais : jette-donc ce leurre. Alors la perfection fut sublime et sur le dos d’une fourmi, de l’abeille qui butine, dans le frémissement du laurier en fleur, dans les métaphoriques soleils de l’araignée habile, les yeux devinrent deux magnifiques fenêtres ouvertes au cœur de la tombe scellant notre amitié constante. Le sépulcre n’est guère une tourmente, et je fais de lui un lit de bonheur. Chaque fois que je respire, je trouve en la mort, les yeux qui s’émerveillent de ton odeur, aspergé de l’écume, irradié de soleil, éclatant de silence, lumineux de chaleur. Le musc enveloppe délicatement ce corps et l’ambre en fait un trésor.
 


Digression

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