Blason
de Venteuil (Marne, Champagne)
D'azur à la bande d'or chargée de trois clefs de gueules posées en fasce, le panneton à dextre vers la pointe, accompagnée, en chef, d'un aquilon aussi d'or et, en pointe, d'un dahu bicéphale saillant du même.
Ma
chère Mado, lundi, tu pourras enfin sortir de ta caverne de plâtre
et te promener à ton aise, sans devoir, à tout bout de champ,
montrer ton Ausweis à la milice. Mais attention, tu ne devras pas
dépasser les cent kilomètres de distance réglementaires car à
partir du cent unième, tu risques autant de contaminer que d'être
toi-même contaminée. Inutile, donc, de te fier au compteur de ta
voiture car ils ont parlé d'une distance à vol d'oiseau. Il te
faudra ainsi éviter les routes tordues ou à lacets et les virages
en équerre, autrement, tu couvrirais les cent kilomètres en n'en
ayant parcouru que la moitié ! Pour plus de sûreté, pense à
tracer un cercle sur ta carte routière, en respectant bien
l'échelle, de sorte à tenir le vol d'oiseau à la ronde. À
l'intérieur de ce périmètre ainsi circonscrit, tu pourras tourner
en rond autant que tu le désires et aller de chez toi à une
extrémité en passant par l'extrémité inverse. C'est un peu comme
d'aller de Paris à Marseille en passant par Lille. C'est toujours ça
de pris. En attendant des jours meilleurs, oublie le moules-frites à
Honfleur et contente-toi de Léon, si l'envie irrépressible t'en
prenait. Pour le cri des mouettes, celles des Tuileries feront
l'affaire. Et pour peu qu'y soufflera un doux zéphir et en fermant
bien les yeux, tu seras tout à fait dans l'ambiance bord de mer. De
toute manière, cela ne te changera guère de tes habitudes de
Paris-Plage et de ton mode de fonctionnement (tu appelles cela un
style de vie) car c'est très exactement ce que tu fais, partout où
tu te poses (ou plutôt fais mine de te poser), ne considérant le
paysage que comme un simple décor attractif autour de ta personne.
Une sorte de plus-value, en somme.
Mado,
toi qui n'as jamais su rester chez toi,
Ce
confinement t'aura mis à la torture,
Car
loin des personnes que d'habitude tu côtoies,
Tes
jours se désœuvrent et s'écoulent sans jointure.
En
réalité, tu erres dans un jour sans fin
Dont,
comme des millions d'autres, tu peuples l'absence.
Quand
le confinement sera levé, enfin,
Donnerez-vous
au monde davantage de présence ?
Vous
récidiverez, ce sera pire qu'avant
Puisque
vous continuerez à semer du vent,
Nourrissant
le ventre de la prochaine tempête,
Sans
n'avoir pris, d'aucune sorte, la mesure de rien,
Et
malgré qu'on se soit donné un mal de chien
Pour
que vous sortiez de l'épreuve un peu moins bêtes.
Le
Spectre à trois faces
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire