Décryptage et Revalorisation de L'Art de L’Écu, de La Chevalerie et du Haut Langage Poétique en Héraldique. Courtoisie, Discipline, Raffinement de La Conscience, état de Vigilance et Intention d'Unicité en La Fraternité d'un Nouveau Monde !

mercredi 20 septembre 2017

Les Allégories du Jardin - Le Rossignol


Blason de Fredersdorf-Vogelsdorf (Brandebourg, Allemagne)

Allégorie 15 – Le Rossignol


Tandis qu’assis sur le bord du ruisseau qui sillonnait ce jardin, je prêtais mon attention au langage muet des fleurs qui l’embellissaient, tout à coup des voix éloquentes s’élevèrent des nids suspendus aux cimes des arbres qui me couvraient de leur ombre. J’entendis d’abord la voix mélodieuse du rossignol, qui, se promettant de séduire par la beauté de son chant, laissa échapper les secrets qu’il cachait avec soin, et sembla, dans son gazouillement emblématique, bégayer ces paroles :

Je suis un amant passionné, ivre d’amour, dévoré par la mélancolie et brûlé par la soif du désir. Lorsque tu verras le printemps arriver, et la nature entière reprendre alors un aspect riant, tu me trouveras tout joyeux dans les jardins, où tu m’apercevras çà et là dans les bosquets, soupirant mes amours, chantant et sautillant sans cesse sur les branches. Si l’on me présente la coupe, je m’y désaltère, et, satisfait du son harmonieux de ma voix, ivre de l’odeur embaumée que je respire, lorsque les feuilles mobiles frémissent au souffle caressant du zéphyr, je me balance sur les rameaux agités : les fleurs, et le ruisseau qui traverse la prairie, occupent tous mes moments, et sont pour moi comme une fête perpétuelle. Tu t’imagines pour cela que je suis un amant folâtre ; tu te trompes ; j’en fais le serment et je ne suis point parjure. Mon chant est le chant de la douleur, et non celui de la joie ; les sons que je fais entendre sont les accents de la tristesse, et non ceux du plaisir. Toutes les fois que je voltige dans un jardin, je balbutie l’affliction qui va bientôt remplacer la gaieté qui y règne ; si je suis dans un lieu agréable, je gémis sur sa ruine prochaine ; si j’aperçois une société brillante, je pleure sur sa séparation. En effet, je n’ai jamais vu de félicité durable ; la paix la plus douce est bientôt troublée, la vie la plus délicieuse devient bientôt amère. J’ai lu d’ailleurs dans les écrits allégoriques des sages, ces mots du Coran : Tout passe dans le monde présent. Comment donc ne point gémir sur une situation si peu assurée, sur un temps exposé aux vicissitudes de la fortune, sur une vie qui s’évanouit, sur un instant de volupté qui va finir ! Voilà l’explication de ma conduite ; je pense que Cela te suffit.

Ce qui seul soutient mon existence, c’est de m’entretenir de ce lieu sacré, séjour inaccessible de celle que j’adore. Ne me blâme point, si tant de fois je répète les chants de mon amour ; quel mortel ne serait pas ivre de volupté, en pensant à un jardin où des plantes odorantes embaument l’air de leur parfum, ou des vins délicieux excitent au plaisir, ou des fleurs dont rien n’égale le charme et la beauté, ornent la terre d’un tapis nuancé, ici d’un blanc pur ou d’un rouge éclatant, la d’un vert tendre, plus loin d’un jaune foncé ! Le ruisseau, les fleurs, les rameaux, semblent s’agiter dans l’arène de mon amour, au son des cordes de ma lyre. Les obstacles cessent, et je vois arriver enfin l’heureux moment du bonheur... Douces pensées, vous êtes ma vie ; sans vous elle finirait.

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