Décryptage et Revalorisation de L'Art de L’Écu, de La Chevalerie et du Haut Langage Poétique en Héraldique. Courtoisie, Discipline, Raffinement de La Conscience, état de Vigilance et Intention d'Unicité en La Fraternité d'un Nouveau Monde !

mardi 22 août 2017

Les Allégories du Jardin - Le Nénuphar


Blasons de Ramold_de_Gorynia et de Frauenchiemsee_Abbey (Bavière, Allemagne)

Allégorie 5 - Le Nénuphar


Le nénuphar, si remarquable par sa couleur triste et par son air languissant, tint alors ce langage :

Toi qui te repais de chagrins, jette le regard de l’attention sur la pâleur de ma corolle, et vois si je puis échapper aux décrets immuables du destin. Je me soumets à mon malheur, mais je ne renonce pas a l’amour. Si tu es amoureux, toi qui écoutes avec avidité mes leçons, use de ménagements, comporte-toi avec prudence. Les jardins sont mon habitat, et les lieux aquatiques le lit de mon repos ; j’aime l’eau limpide et courante, et ne m’en sépare ni le matin, ni le soir, ni l’hiver, ni l’été. Ce qui est bien plus extraordinaire, c’est que, tourmenté d’amour pour cette eau, je ne cesse de soupirer après elle, et qu’en proie à la soif brûlante du désir qu’elle m’inspire, je l’accompagne partout ; mais as-tu jamais vu rien de pareil ! être dans l’eau et se sentir dévoré par la soif la plus ardente.

Lorsque le jour paraît, je déploie mon calice doré, et mille mains jalouses viennent fondre sur moi ; au contraire, lorsque la nuit enveloppe la terre de ses ombres, l’onde m’attire vers elle ; ma corolle quitte sa position et s’incline ; je m’enfonce dans l’eau, qui me recouvre ; je me retire dans mon nid de verdure, et je reviens à mes pensées solitaires. Mon calice, comme un œil vigilant, est submergé dans l’eau, pour contempler ce qui fait son bonheur , et les hommes irréfléchis ne savent plus où je suis. Le censeur importun ne réussira pas à m’éloigner de l’objet de ma flamme. D'ailleurs, quelque part que mes désirs me portent, je vois que l’eau est toujours à mes côtés ; si je viens la prier de soulager l’ardeur qui m’enflamme, elle m’abreuve de sa douce liqueur ; si je lui demande un asile, elle me reçoit avec complaisance. Mon existence est liée à la sienne, et la durée de ma fleur dépend du séjour qu’elle fait auprès de moi. Enfin, c’est par l’eau seule que je puis acquérir le dernier degré de la perfection ; c'est à ses seules qualités que je dois les propriétés dont je suis pourvue. On ne me verra jamais sans cet objet adoré, car sans lui je ne pourrais exister en aucune manière.


Blason de Brocēni (Lettonie) et de Enger (Rhénanie du Nord-Westphalie, Allemagne)


L’amour a couvert mon corps du vêtement décoloré de la langueur ; troublé par la passion qui l’agite, mon esprit s’abandonne au plus noir chagrin. Lorsque l’amour décoche son trait, il semble que c’est moi qu’il veuille frapper de préférence à tout autre. La beauté cruelle que j’adore feint de venir auprès de moi, et elle excite dans mon sein un amour qui l’agite et le brise. Je ne vis que pour elle, et je veux mourir pour elle ; oui, l’amour lui-même me préparera cette mort glorieuse. Il me dit : Ne rêve qu’amour, si tu veux jouir du bonheur que je promets. Je défends, par la pointe des lances, l’approche de ce divin objet ; ce n’est qu’auprès de mes piques rembrunies que tu trouveras les douceurs que j’accorde. Ne t’afflige donc point de la blessure cuisante des flèches, ni de l’amertume de la peine ; le bonheur en est le résultat. Imite ces amants fidèles qui sont morts d’amour pour leur divine maîtresse, mais qui ont obtenu l’objet de leurs désirs. Quand, après avoir traversé la mer Rouge, les enfants d’Israël, épuisés de fatigue, entendirent sur le mont Sinaï ces douces paroles : « Je suis celui qui suis », ils ne regrettèrent point leurs peines et leurs travaux.


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