Décryptage et Revalorisation de L'Art de L’Écu, de La Chevalerie et du Haut Langage Poétique en Héraldique. Courtoisie, Discipline, Raffinement de La Conscience, état de Vigilance et Intention d'Unicité en La Fraternité d'un Nouveau Monde !

jeudi 24 août 2017

Les Allégories du Jardin - Le Saule d'Égypte

Allégorie 6 - Le Saule d'Égypte

Blason de Widnau (Canton de Saint-Gall, Suisse)

Lorsque les arbres eurent vu que le saule était le seul d’entre eux dont les rameaux flexibles se balançassent sans cesse, ils critiquèrent la mollesse de ses mouvements, et censurèrent sa fierté et sa complaisance pour lui-même. Alors le saule agita de nouveau ses rameaux légers, et s’exprima ainsi dans son langage muet :

A-t-on quelque chose à me reprocher ! Pourrait-on blâmer le tremblement de mon feuillage et l’agitation de mes branches ! C’est pour moi que la terre déroule ses tapis nuancés, que les prés déploient toute leur parure, et que l’haleine du zéphyr matinal répand ses douces émanations. Lorsque je m’aperçois que les végétaux sont sur le point de ressusciter, que la terre s’agite et se ranime, que la trompette de la promesse que Dieu m’a faite sonne, que l’accomplissement de cette promesse abroge la menace dont j’avais été l’objet ,et que mes fleurs vont s’épanouir ; quand, d’un autre côté, je vois que déjà la rose a paru, que les frimas se sont retirés, que les fleurs brillent des plus vives couleurs, que le grain commence à se former, que déjà le rameau dépouillé se couvre de feuilles, que les différents végétaux destinés aux mets et aux boissons de l’homme s’unissent pour lui fournir la substance qui le fait vivre, je m’élève alors à la connaissance du Créateur et du Maître de toutes ces choses et je reconnais qu’il est unique, éternel, tout-puissant ; qu’il n’a besoin de personne, et que personne ne peut se passer de lui, bien loin de partager son empire ; qu’il n’a point engendré et n’a pas été engendré ; qu’aucun être, enfin, n’est semblable à Lui. C’est par ces considérations que ma cime élevée s’agite pour se réjouir de la vision intuitive qui fait mes délices, et que les rossignols de mon bonheur gazouillent sur mes rameaux tremblants. Ensuite, par un effet de la grâce de Dieu, objet de mon culte, je pense au néant de mon être ; et, de crainte de manquer mon but, je me tourne vers la rose, je lui annonce ma venue, et, tandis que mes fleurs lui forment en tombant comme une robe élégante, je lui demande quel est l’objet de mon existence. Nous nous ressemblons bien parfaitement en tout , me répond-elle ; si tes rameaux paraissent s’incliner pour prier le Très-Haut, on dirait que les miens se prosternent pour L’adorer ; si ta beauté Consiste dans le vert de ton feuillage, la mienne consiste dans l’incarnat de mes joues. Mon fière, n’attendons pas le feu éternel qui doit nous consumer ; jetons-nous nous-mêmes dans les flammes, pour nous offrir en holocauste. Si tel est ton désir, lui répliqué-je, et si tu consens à périr, je ne m’y oppose point et je veux bien ne pas me séparer de toi. On nous arrache donc ensemble du milieu des fleurs nos compagnes ; on nous livre à un feu ardent qui fait monter nos esprits, et qui, sans pitié, fait couler nos larmes. Nos corps périssent, mais nos âmes restent ; notre beauté extérieure s’évanouit, mais nos qualités intérieures demeurent. Il est vrai, cependant, qu’il y a une grande différence entre ce que nous étions et ce que nous devenons.

Déjà. la rose était venue ; elle annonçait les propriétés agréables qu’elle possède , lorsque le saule à la taille légère se tourna vers elle pour se plaindre de la violence de l’amour dont il était épris, et s’inclina avec grâce pour respirer le parfum délicieux qu’elle exhalait. La rose, partageant sa douleur, lui dit : Amis intimes, en proie à la même ardeur, nous ne faisons qu’un et nos qualités sont les mêmes. Combien de fois n’avons-nous pas éprouvé les tourments les plus violents des flammes ! Mais jamais mon compagnon n’a perdu de vue l’objet de sa passion, et jamais je n’ai oublié l’objet de la mienne. Combien de fois aussi des mains avides ne nous ont-elles point privés de nos rameaux encore verts ! On ne saurait comprendre à quel point la flamme cruelle tourmente nos entrailles, et dans quel brasier nos cœurs sont consumés. Le feu sépare nos esprits de nos corps, comme il a commencé par nous priver de nos forces. Nous nous plaignons tous deux des mêmes douleurs, quoique chacun nous ayons l’objet particulier de notre amour. Je le jure par celui qui de toute éternité repose sur son trône, et mon serment est véritable, il y a dans l’exposition de ma peine un sujet de réflexion pour les gens sensibles, dont le cœur est éloigné du mal ; j’étais hier comme la pleine lune qui se lève, et je suis aujourd’hui comme une étoile qui disparaît.

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