Blason de Friedrichswalde (Brandebourg, Allemagne)
Ma
chère Mado, il m'est venue cette pensée, ce matin. Je te la livre à
l'emporte-pièce, comme d'habitude, c'est-à-dire parfaitement
indigeste pour les bien-pensants et les mous du cerveau, mais tout à
fait comestible pour ceux qui n'en peuvent plus de la bêtise
ambiante. Certes, on sait que le QI moyen est en chute libre, mais je
soupçonne beaucoup d'être de mauvaise foi et de se mettre
volontairement des œillères, par peur ou par lâcheté.
Les
gens n'auraient jamais dû quitter leurs sabots pour chausser des
souliers de ville. À
peine ont-ils encore le goût d'une vraie pomme, à force de ne
manger que de la betterave colorée. Et avec le goût des bonnes
choses s'est fatalement perdu le goût et le sens du vrai, à ne
commencer que par le simple bon sens. Le gazon a remplacé l'herbe à
foin et l'on déambule dans les supermarchés plutôt qu'on ne se
rend au jardin et au verger. La voiture a permis de s'éparpiller aux
quatre vents et l'on a fini par croire que le ciel était plus bleu
ailleurs, l'herbe plus verte et l'eau plus mouillée. On déserte les
champs puis les églises, sans penser que la nature a horreur du
vide. On quitte le village devenu un trou perdu pour aller se
dissoudre dans l'anonymat des villes concentrationnaires où
l'agitation permanente donne l'illusion qu'il s'y passe quelque chose
et de n'être plus au milieu d'un nulle part que l'on s'empresse par
ailleurs de fuir périodiquement.
Bon,
dispense-moi des lieux communs, genre « on n'arrête pas le
progrès » (pliée de rire car c'est plutôt le progrès qui
nous arrête et nous fait tourner en rond) ; « on ne peut pas
revenir en arrière » (morte de rire, cette fois-ci, car en
matière de droits et de libertés, c'est plutôt machine arrière
toute !). Fais-moi
également grâce de toutes ces tartes à la crème qui évoquent
l'esprit français à la sauce républicaine chanté, justement (ou
plutôt faussement) par les bradeurs et les fossoyeurs du pays.
Épargne-moi,
enfin, tous les poncifs de la bien-pensance (c'est-à-dire de la
non-pensée) martelés par les camelots du nivellement par le bas.
L’imbécilité n'est pas une obligation, encore moins une fatalité.
Car à force de réclamer des droits, on en oublie les devoirs dont
le premier est celui d'intelligence. Et l'intelligence, comme tu ne
le sais toujours pas, c'est la capacité à relier les choses. Toute
cause à ses effets et inversement. Chercher ailleurs, c'est mettre
la charrue avant les bœufs. Mais les Français ont oublié la
première comme les seconds, plus soucieux du prix de l'essence, du
programme télé et de leur prochaine destination pour les vacances.
Les
politiques (mais seulement quand ils sont dans l'opposition) leur
clament qu'il faut changer les hommes au pouvoir et réformer le
système (qu'ils s'empressent d'ailleurs d'aggraver une fois aux
commandes, toutes tendances et alternances confondues). Mais aucun ne
leur dira qu'ils seraient bien inspirés de se changer d'abord
eux-mêmes. Que révolution sans révolution intérieure n'est qu'un
trou dans l'eau. Ce serait électoralement suicidaire.
Ma
chère Mado, je crois que la France est fichue
Car
ceux qui devraient la relever se divisent,
À
l'heure où les prétendues élites ont déchu,
N'étant
plus même dans la posture d'une vaine devise.
Et
tandis que l'incendie ravage la maison,
L'on
dispute sur la manière de la reconstruire,
Chacun
voulant avoir contre l'autre raison.
L'on
en déduira ce qu'on voudra en déduire,
Mais
si la France va mal, c'est la faute aux Français ;
Il
est inutile de chercher ailleurs la cause.
Que
reste-t-il de leur culture ? Bien peu de choses.
Ont-ils
cru qu'un pays qui se « mode-ternisait »
N'irait
pas jusqu'à les déposséder d'eux-mêmes ?
Vous
mordiez à belles dents ? Vous voilà en carême !
Le
Spectre à trois faces
En direct du Co-vide
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire