D'entre toutes les espèces animales les plus menacées,
L'ours et le bouquetin ne sont pas les dernières.
Il s'en faut de peu de parler d'eux au passé,
Étant acculés par devant et par derrière
Dans un territoire de plus en plus confiné.
« Certes, dit l'Ours, si notre rareté nous sauve,
Nous restons passibles d'être éliminés.
Tenez, il suffit que je me comporte en fauve
- C'est bien ce que je suis car telle est ma nature -
Et qu'à cet effet, je fasse d'un mouton ma proie,
L'on aura tôt fait de me disputer mon droit.
La tolérance dont je jouis n'est qu'une devanture
Et la réserve qu'on m'octroie n'est jamais qu'un zoo
Où je dois faire le gentil nounours et le beau. »
Le Bouquetin acquiesça ces mots et ajouta :
« Serons-nous de ces maux jamais tirés d'affaire ?
Nous voyons se rétrécir notre habitat
Où la vile engeance des braconniers prolifère.
L'on nous chasse, non pour la viande, mais pour les trophées
Dont se veut pavoiser la maison roturière,
Se pensant de la sorte quelque peu s'étoffer.
La vanité des hommes est souvent meurtrière
Et leur histoire n'en dresse que la longue litanie.
Combien d'exploits héroïques et de grandes conquêtes
Furent à vrai dire inspirés par l'égomanie ?
Tu es, à côté, un bien piètre prédateur ;
Nul animal, jamais, ne se comporte en bête,
Pas plus qu'il n'est d'une cruauté l'instigateur. »