Insigne d'épaule de la 8e division d'infanterie américaine(1918-1992)
La
connaissance de soi procède par éliminations : « Je ne
suis pas ceci, je ne suis pas cela ; ni mon corps, ni mes
pensées, ni mes sentiments ; pas plus la personne que je
m'imagine que le personnage que je projette dans le monde, encore
moins ce que celui-ci en perçoit. Ni je ne me réduis à l'un
quelconque de ces aspects, ni je ne me résume à leur ensemble. »
Ces
aspects, ces expressions, ces apparences, ces fonctions ne sont
jamais que des compositions, nées du tissage de faisceaux multiples
- l'héritage génétique, le contexte sociétal, le milieu social,
les conditions existentielles – auxquels nous ajouterons le dessein
antérieur à la naissance incarnée et dont la mémoire, même
brouillée, voire ignorée ou insoupçonnée, qui régit le destin
d'une existence, n'en œuvre pas moins, à travers les choix que l'on
fait et que l'on croit avoir. La connaissance de soi consiste d'abord
à en comprendre le sens et la sagesse.
Le
sens : sa recherche naît d'un sentiment de vide, un état qui
procède en réalité de la discontinuité et de l'impermanence (la
non-chose-en-soi, le non-moi-en-soi). Cet état inspire à se donner
des raisons de vivre et d'exister dans ce monde perçu comme une
finitude, c'est-à-dire ayant sa fin en lui-même. Ainsi,
l'éphémérité de la vie n'est pas vécue comme un passage, une
étape dans ce qui n'est qu'une traversée, mais comme une parenthèse
entre deux néants, une posture, au demeurant, qui ne satisfait pas
l'être profond et dont aucune traduction sur aucun plan n'emplit le
vide éprouvé. D'où la compulsion dans l'avoir pour combler ce
vide... par encore plus de vide.
Tout
est composé. Ce qui est composé se décompose. Rien n'est acquis,
rien ne peut s'approprier : ni les choses, ni les idées, ni les
personnes, ni les identités. Rien.
Le
sens n'est pas un terme, le point destinal d'une direction, car rien
ne le définit, rien ne le localise, quand même, paradoxalement,
tout le balise. Toute représentation le réduit, toute formation le
fige.
Le
sens n'est pas une conquête mais une quête, qui consiste à
éclaircir l'opacité de la conscience et à éclairer les fausses
directions. Il ne se construit pas mais se découvre. Par le
lâcher-prise (le non-agir du Tao). Le sens précède sa recherche.
C'est lui qui nous cherche.
Ne
pas se projeter au-delà du Réel. Être à l'instant. Non pas comme
une pulsion dans l'immédiateté mais comme l'accueil de Ce qui Est.
C'est par la Présence que se dégage le sens qui est un état de
conscience, un ajustement constant à l'Ordre immanent.