Inspiré d'une fable de Fénelon
Deux renards parvinrent à pénétrer sans ennui
Dans un poulailler empli de pondeuses bien grasses ;
Il fallut œuvrer avant la fin de la nuit ;
D'un jeûne prolongé, l'appétit serait vorace.
Le plus jeune se voulut manger à satiété,
Et profiter pleinement de la providence.
Le plus ancien conseilla la sobriété :
« Ne perdons point la raison d'une telle abondance
Et ménageons dans le temps une sûre provision.
– Je ne crois pas, comme vous, qu'elle soit aussi certaine ;
Il sera longtemps avant une pareille aubaine. »
Mais parfois les faits contredisent les prévisions :
Le jeune mangea à s'en faire éclater la panse ;
Le vieux, d'une récidive, fut réduit au silence.
Blason de Hažín nad Cirochou (Slovaquie)
Deux renards parvinrent à pénétrer sans ennui
Dans un poulailler empli de pondeuses bien grasses ;
Il fallut œuvrer avant la fin de la nuit ;
D'un jeûne prolongé, l'appétit serait vorace.
Le plus jeune se voulut manger à satiété,
Et profiter pleinement de la providence.
Le plus ancien conseilla la sobriété :
« Ne perdons point la raison d'une telle abondance
Et ménageons dans le temps une sûre provision.
– Je ne crois pas, comme vous, qu'elle soit aussi certaine ;
Il sera longtemps avant une pareille aubaine. »
Mais parfois les faits contredisent les prévisions :
Le jeune mangea à s'en faire éclater la panse ;
Le vieux, d'une récidive, fut réduit au silence.
Marc
Deux Renards entrèrent la nuit par surprise dans un poulailler; ils étranglèrent le coq, les poules et les poulets ; après ce carnage, ils apaisèrent leur faim. L’un, qui était jeune et ardent, voulait tout dévorer ; l’autre, qui était vieux et avare, voulait garder quelques provisions pour l’avenir. Le vieux disait: « Mon enfant, l’expérience m’a rendu sage; j’ai vu bien des choses depuis que je suis au monde. Ne mangeons pas tout notre bien en un seul jour. Nous avons fait fortune; c’est un trésor que nous avons trouvé, il faut le ménager. » Le jeune répondait: « Je veux tout manger pendant que j’y suis, et me rassasier pour huit jours ; car, pour ce qui est de revenir ici, chansons ! Il n’y fera pas bon demain : le maître, pour venger la mort de ses poules, nous assommerait. » Après cette conversation, chacun prend son parti. Le jeune mange tant, qu’il se crève et peut à peine aller mourir dans son terrier. Le vieux, qui se croit bien plus sage de modérer ses appétits et de vivre d’économie, veut le lendemain retourner à sa proie, et est assommé par le maître.
Ainsi chaque âge a ses défauts : les jeunes gens sont fougueux et insatiables dans leurs plaisirs ; les vieux sont incorrigibles dans leur avarice.
Ainsi chaque âge a ses défauts : les jeunes gens sont fougueux et insatiables dans leurs plaisirs ; les vieux sont incorrigibles dans leur avarice.
Fénelon (1651-1715)
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