L'art
culinaire commence véritablement avec la découverte du feu dont la
chaleur permet de faire cuire les aliments. L'usage du sel est la
seconde grande étape car il améliore non seulement le goût de certains
aliments mais surtout, il permet de les conserver plus longtemps,
particulièrement la viande. L'autre grande étape est le passage du
paléolithique au néolithique, c'est-à-dire à l'agriculture-élevage qui
transformera considérablement les habitudes alimentaires. Le feu
permettra aussi de faire cuire pour les durcir des ustensiles en terre
destinés à contenir les aliments.
La
vaisselle des Grecs était en argile ou en bronze. Malgré son emploi
multiple (pour la préparation de la viande, des brouets, des légumes,
etc.) la marmite gardait la forme primitive de tous les récipients :
celle de l’œuf, nécessitant, par suite de son instabilité, l'emploi du
trépied. Le service de table se composait de terrines, d'assiettes et
d'écuelles ; la nappe était inconnue aux Grecs. Des croûtons de pain,
creusés et remplis d'aliments, tenaient lieu de cuillères, mais on se
passait couramment de cet expédient, en se servant tout simplement des
doigts, qu'on nettoyait pendant le repas avec de la mie de pain. Le
raffinement de la civilisation fit inventer plus tard des gants spéciaux
pour protéger la main contre la chaleur des mets. À l'heure des repas,
de petites tables garnies de plats étaient placées devant le lit de
repos ; chaque personne avait son propre service.
Les
Arabes fabriquaient leurs ustensiles sur des modèles asiatiques. Les
matières employées se composaient généralement de terre glaise et
d'argile ocreuse et, en dehors des métaux précieux, de cuivre, d'étain,
de bronze et de laiton. La pièce principale de leurs services de table
consistait en un grand plateau, placé directement sur le sol ou bien sur
une espèce de guéridon bas, au milieu des convives assis sur un tapis.
Les divers mets, découpés menu et contenus dans des bols, étaient servis
sur ce plateau : on puisait dans les bols avec les doigts. Pour le
potage, cependant, on se servait d'une cuillère en bois, fréquemment
aussi d'une croûte de pain évidée. Les vases à boire n'avaient pas
d'anse mais étaient munis d'un couvercle.
Les
services de table et de cuisine des Grecs conservèrent leurs formes
primitives dans les grandes lignes jusqu'au Bas-Empire. Un évêque
délégué du roi d'Italie Bérenger II, mentionne dans ses écrits le
banquet solennel que les empereurs byzantins avaient coutume de donner à
leurs ministres, à l'occasion de la fête orthodoxe de l'Incarnation du
Christ. Ce jour-là, l'argenterie habituelle était remplacée par des
vases et des plats en or. Vers la fin du festin, on voyait apparaître
des fruits contenus dans des corbeilles en or massif si lourdes que leur
transport nécessitait l'emploi de voiturettes spéciales, et que pour
les hisser sur la table, il fallait recourir à une poulie. À Byzance,
les couteaux de table étaient également inconnus ; les mets se servaient
tout découpés. L'usage de la fourchette, qui apparut probablement pour
la première à cette époque dans l'Empire d'Orient, ne se répandit que
très lentement. On ne se couchait plus pour les repas ; on se servait de
chaises et de fauteuils. Les tables étaient souvent richement décorées
et couvertes d'une nappe.
Les
services de tables des Français, des Bourguignons, des Allemands et des
Italiens des premiers siècles du Moyen-Âge ne différaient pas
sensiblement entre eux. Ils étaient faits en bois, en terre, en cuivre,
en étain ; les seigneurs avaient de la vaisselle en or et en argent. Les
vieilles chroniques énumèrent avec force détail les richesses de ce
genre des rois et empereurs de l'époque. Des vases en verre taillé, en
ivoire, en pierre fine (albâtre, agate, onyx, etc.) étaient fort
recherchés, mais naturellement d'un usage peu courant. Les tables
étaient ou recouvertes entièrement d'une nappe ou simplement bordées sur
les quatre côtés. Il n'y avait pas d'assiette pour l'usage individuel,
les fourchettes étaient considérées comme des objets d'un luxe excessif
et, partant, blâmable. Pour le découpage de la viande seulement, on se
servait, simultanément avec le couteau à trancher, d'une grande
fourchette à deux dents. La fourchette, telle que nous l'employons
aujourd'hui, est mentionnée pour la première fois – et encore, comme
objet de luxe – à Florence, en 1360. Un inventaire de 1767, fait à
l'hôpital de Rotenfels, en Allemagne, indique bien des couteaux et des
cuillères, mais point de fourchettes. Ce fait montre assez combien
l'usage de ce petit ustensile a tardé à se généraliser chez certains
peuples.
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